En tant qu'avocat, salarié ou indépendant, vous devez obligatoirement cotiser au régime de base et au régime complémentaire de retraite. Ces régimes sont tous deux géré par la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), qui est indépendante depuis 1954. Ce livre blanc vous permettra de mieux vous y retrouver concernant les régimes en place, les évolutions sur les dernières années et les différents biais par lesquels vous pourrez améliorer votre retraite.
Le changement majeur serait de passer à un régime unique universel à la place des régimes en place, présentés ci-après.
La réforme des retraites est mal accueillie par les avocats pour plusieurs raisons :
- La CNBF est excédentaire de 2 milliard, avec 1 retraité pour 4 à 5 avocats actifs aujourd'hui ;
- Le régime est autonome, géré par les avocats eux-mêmes ;
- Le régime actuel participe au financement du régime général à hauteur de 100 millions d'euros par an ;
- La réforme entraînerait une augmentation des cotisations de 14% à 28% : ce taux serait trop élevé puisqu'ils n'ont pas de part patronale comme les salariés ou les fonctionnaires. Ils devront donc s'acquitter de l'ensemble des cotisations, contrairement à la majorité de la population ;
- Les avocats craignent également une diminution du montant minimum des retraites : le Conseil National des Barreaux (CNB) estime que les pensions de retraite minimales passeraient à 1 000 euros net par mois, contre 1 416 euros net par mois actuellement.
Le souhait des avocats est donc, pour une grande majorité, de conserver leur régime puisqu'il fonctionne assez bien et ne coûte pas d'argent à l'Etat. D'autant plus que l'augmentation des cotisations posera problème pour les petits cabinets d'avocats et pour les avocats qui gagnent moins de 40 000€ par an. Le bâtonnier de Lyon et la bâtonnière de Châteauroux craignent que le droit soit moins accessible, notamment dans les zones plus rurales où les cabinets sont de petites tailles.
A noter que la hausse du taux de la Contribution Sociale Généralisée (CSG) a déjà fait diminuer le montant des pensions des retraités depuis 2018. En effet, la CSG qui est prélevée sur les pensions de retraite a augmenté de 1,7 points en 2018 (en passant de 6,6% à 8,3%). La CSG a pour objectif de participer au financement de la Sécurité sociale et depuis 2018, au financement de l'assurance chômage.
Il devient donc essentiel de préparer sa retraite pour les avocats : en effet, l'avenir étant incertain concernant la réforme à venir, il est préférable de prendre ses dispositions.
Deux produits d'épargne sont disponibles afin de vous permettre la constitution d'une bonne retraite : le Plan Epargne Retraite (PER) et l'assurance-vie.
Le PER, qu'est-ce-que c'est ?
Le PER remplace le contrat Madelin, conserve les avantages fiscaux tout en l'assouplissant considérablement : sortie anticipée, sortie en capital, flexibilité des versements.
La structure (BNC, SELARL, SARL, etc.) assume les cotisations.
- Pour la SELARL : les cotisations sont considérées comme une charge et viennent baisser l'IS (impôt sur les sociétés).
- Pour un statut BNC : les cotisations viennent quant à elles baisser le BNC, et donc l'IR (impôt sur le revenu) de la personne concernée.
A noter que les cotisations, payées par la société, créent automatiquement des droits retraites supplémentaires.
Avec le PER, vous pouvez avoir un accès plus flexible à votre capital :
- A la retraite (à partir de 62 ans), le titulaire du contrat percevra un capital ou une rente au moment de la liquidation de sa retraite. Il pourra bénéficier, tout au long du contrat, d'une déduction sur son revenu imposable de la somme de tous les versements de l'année.
- En cours de vie du contrat : le PER permet également au titulaire une sortie partielle en capital en cours de vie du contrat pour financer l'achat d'une résidence principale.
Sortie en capital ou rente : plusieurs scénarios existent.
- Sortie en capital au moment de la retraite.
- Un mix entre capital (une partie) et de la rente.
- Uniquement des rentes, avec des nombreux schémas possibles : rente simple, réversible, non réversible, à annuités garanties, par palier, etc.
Finalement, le PER est un dispositif pour pallier les carences du régime obligatoire puisqu'en tant que TNS, votre pension de retraite de base sera relativement faible. Vous avez donc tout intérêt à investir pour votre retraite. Le PER peut être une bonne solution pour maintenir un bon niveau de vie pendant cette période.
L'assurance vie, un autre moyen pour vous assurer une retraite convenable
Alors que l'assurance vie est l'un des produits d'épargne préférés des français, vous pouvez vous en servir pour vous constituer une retraite. A sa création, l'objectif de l'assurance vie était de s'assurer qu'un capital soit versé de la part de l'assureur soit à l'assuré de son vivant (demande de rachat partiel ou rachat total) ou à un tiers (désigné au préalable) en cas de décès de l'assuré.
Aujourd'hui, l'assurance-vie est également devenue un produit pour se constituer une épargne régulière, une épargne de précaution (en cas de frais médicaux imprévus par exemple), un apport pour un projet immobilier, mais également pour transmettre l'épargne avec une fiscalité avantageuse, etc. L'assurance-vie sert également à compléter votre retraite.
Vous pouvez programmer vos versements afin de vous assurer d'épargner régulièrement et de disposer, au final, d'une épargne conséquente.
Si vous épargnez sur une assurance-vie en vue d'améliorer votre retraite, vous pourrez, au moment de la liquidation de votre retraite, effectuer des rachats partiels programmés afin de compléter le montant de votre retraite.
Le régime de base : quel fonctionnement ?
Le régime de base des avocats est donc géré par la CNBF et l’ensemble des avocats doit cotiser à ce régime, qu’ils soient salariés ou indépendants. La retraite est calculée comme suit : Montant forfaitaire . Taux . (Durée d'assurance / Durée d'assurance requise pour le taux plein) Le montant forfaitaire est fixé chaque année par la CNBF, le taux est le taux de liquidation qui dépend de l’âge de la liquidation de la retraite, la durée d’assurance acquise est le nombre de trimestres que vous avez validés et la durée d’assurance requise est le nombre de trimestres requis pour obtenir le taux plein.
Année de naissance | Âge légal de départ à la retraite | Nombre de trimestres requis pour obtenir le taux plein | Âge légal de départ au taux plein quel que soit le nombre de trimestres validés |
---|---|---|---|
1953 | 61 ans et 2 mois | 165 (41,25 ans) | 66 ans et 2 mois |
1954 | 61 ans et 7 mois | 165 (41,25 ans) | 66 ans et 7 mois |
1955 à 1957 | 62 ans | 166 (41,5 ans) | 67 ans |
1958 à 1960 | 62 ans | 167 (41,75 ans) | 67 ans |
1961 à 1963 | 62 ans | 168 (42 ans) | 67 ans |
1964 à 1966 | 62 ans | 169 (42,25 ans) | 67 ans |
1967 à 1969 | 62 ans | 170 (42,5 ans) | 67 ans |
1970 à 1972 | 62 ans | 171 (42,75 ans) | 67 ans |
1973 et années suivantes | 62 ans | 172 (43 ans) | 67 ans |
Si vous avez atteint l’âge minimum légal de départ (voir ci-dessus, selon votre année de naissance), vous pouvez prendre votre retraite même si vous n’avez pas acquis le nombre de trimestres pour bénéficier du taux plein. Cependant, dans ce cas, une minoration sera appliquée. Elle est alors calculée soit sur la base du nombre de trimestres manquants pour atteindre la durée d'assurance requise pour le taux plein soit sur la base du nombre de trimestres manquants pour atteindre l’âge légal requis pour le taux plein.
Votre retraite sera minorée de 1,25% par trimestre manquant. Ce coefficient sera appliqué sur le montant de la retraite de base et sur celui de la retraite complémentaire.
Une majoration peut également s’appliquer dans le cas où vous avez acquis le nombre de trimestre pour bénéficier du taux plein et que vous continuez à valider des trimestres. Cette majoration s’applique uniquement sur la retraite de base, contrairement à la minoration qui s’applique sur la retraite de base et sur la retraite complémentaire. Le coefficient de majoration s’élève à 0,75% par trimestre supplémentaire cotisé entre le 1er janvier 2004 et le 30 juin 2010 et à 1,25% par trimestre supplémentaire cotisé à partir du 1er juillet 2010.
La cotisation à ce régime se découpe en 3 cotisations :
- Les droits de plaidoirie ou la contribution équivalente (il est à noter que cette première cotisation n’entre pas dans le calcul de la pension) : A chaque plaidoirie, l’avocat verse un droit sous forme d’un montant forfaitaire. Si le total des droits ne dépasse pas un tiers des dépenses du régime, alors l’avocat (ou le cabinet d’avocats) doit verser une “contribution équivalente” pour compléter la différence.
- La cotisation forfaitaire : Elle est différente selon l’année d’exercice. Pour 2021, voici un récapitulatif provisoire des cotisations publié par la CNBF :
Première année | 294 € |
Deuxième année | 590 € |
Troisième année | 926 € |
Quatrième année | 1 261 € |
Cinquième année | 1 261 € |
Sixième année et suivantes | 1 610 € |
65 ans et plus | 1 610 € |
- La cotisation sur le revenu professionnel : Pour les 2 premières années, le montant de la cotisation est fixé par la CNBF. Pour 2020 et 2021, ce montant s’élève à 242€. Une régularisation est faite les années suivantes lorsque le montant du revenu net est connu. Pour les avocats exerçant avant 2020, la cotisation s’élève à 3,10% du revenu net, dans la limite de 297 549 euros.
Exemple de calcul de la retraite de base
- Si l’avocat a cotisé toute sa carrière au régime des avocats, alors le montant de sa retraite de base en 2021 sera de 17 255 € brut annuel.
- Si ce n’est pas le cas, il percevra une pension proportionnelle au nombre de trimestres validés au sein du régime des avocats et les autres régimes auxquels l’avocat a cotisé lui verseront également une pension proportionnelle aux trimestres qu’il aura validé.
- Par exemple, un avocat né en 1956 souhaite prendre sa retraite en septembre 2021 (à 65 ans), il a validé 160 trimestres : il lui manque 6 trimestres pour obtenir la durée d’assurance requise et 8 trimestres pour atteindre 67 ans (âge légal de départ au taux plein quel que soit le nombre de trimestres cotisés). On retient donc la situation la plus favorable : les 6 trimestres manquants.
→ Si cet avocat a cotisé à la CNBF toute sa carrière, il percevra une pension de : 17 255 x 160/166 = 16 631,33 € - 6 x 1,25 % = 16 631,33 € - 7,5 % = 16 631,33 € - 1247,35 € = 15 383,98 € brut annuel.
→ S’il a cotisé 150 trimestres à la CNBF et 10 trimestres au régime général, alors sa pension s’élèvera à : 17 255 x 150/166 = 15 591,87 € - 6 x 1,25 % = 15 591,87 € - 7,5 % = 15 591,87 € - 1 169,39 € = 14 422,48 € brut annuel.
Il percevra une pension de la part du régime général pour les 10 trimestres cotisés dans ce régime.
Le fonctionnement du régime complémentaire
Le régime complémentaire a été réformé en 2015 : avant 2015, il existait 3 classes de cotisations, dont 2 obligatoires. Depuis 2015, le régime complémentaire entre dans une transition qui prendra 14 ans au total, afin d’augmenter progressivement les cotisations.
En 2021, il existe 3 classes de cotisations et à terme, en 2029, il n’y aura plus qu’une seule classe.
Chaque classe est divisée en 5 tranches de revenus définies par un plafond qui est déterminé, chaque année, par le Conseil d’Administration de la CNBF. Comme dans le régime de base, lors des 2 premières années d’exercice, les avocats payent une cotisation forfaitaire, qui s’élève à 323€ en 2020 et en 2021.
Revenu/ Classes | 1€ à 42 507€ | 42 508€ à 85 014€ | 85 015€ à 127 521€ | 127 522€ à 170 028€ | 170 029€ à 212 535€ |
C1 | 4,20% | 8,00% | 9,20% | 10,40% | 11,60% |
C2 | 5,10% | 9,20% | 10,70% | 12,20% | 13,70% |
C3 | 6,00% | 11,60% | 13,70% | 15,80% | 17,90% |
Afin d’acquérir davantage de points et donc améliorer vos droits, vous pouvez choisir une classe supérieure à celle que vous avez choisie jusqu’ici. En effet, plus vous choisissez une classe élevée, plus le nombre de points que vous allez acquérir seront nombreux. En 2021, le coût d’acquisition d’un point est de 10,3431€ (contre 10,0516€ en 2020).
Retrouvez le simulateur de cotisations disponible sur le site de la CNBF en cliquant ici.
Le choix de la classe de cotisations
Pour changer de classe, il faut en informer la CNBF :
- Pour les avocats salariés et leurs employeurs au plus tard au 31 décembre de l’année N pour les cotisations de l’année N+1
- Pour les avocats non-salariés au plus tard le 31 janvier pour les cotisations de l’année en cours.
Si avant cette date, aucun choix n’est fait, la CNBF conservera les taux de la classe appliqués précédemment.
Le paiement des cotisations
Généralement, le paiement se fait à l’année. L’avocat peut tout de même demander à ce que le règlement de ses cotisations soit réalisé en 2 versements égaux (au plus tard le 30 avril pour le premier versement et au plus tard le 30 octobre pour le second versement).
Le ou les paiement(s) peuvent être réalisés par prélèvement automatique afin de simplifier la procédure.
Le calcul de la retraite complémentaire
Pour calculer votre retraite complémentaire, vous devez multiplier le nombre de points que vous avez acquis pendant votre carrière par la valeur de service du point de l’année en cours (0,9527€ en 2021, contre 0,9480€ en 2020)
Le calcul de la retraite complémentaire repose sur les mêmes paramètres que ceux du régime de base. La retraite complémentaire est liquidée au même moment que la retraite de base.
Pour calculer votre retraite complémentaire, le calcul est le suivant : Valeur du point . Nombre de points . Taux de pension
En 2021, la valeur du point s’élève à 0,9527€, le taux de pension est égal à 100% si l’assuré a la durée d’assurance requise ou qu’il a atteint l’âge de départ à taux plein. Cependant, si ce n’est pas le cas, le taux de pension subira une minoration de 1,25% par trimestre manquant.
Exemples de calcul de la retraite complémentaire
- Si l’avocat part à la retraite à 67 ans en 2021 et qu’il a acquis 68 712 points tout au long de sa carrière, sa retraite complémentaire s’élèvera à 68 712 x 0,9527 x 100% = 65 461,92 € brut annuel.
- S’il part à 65 ans en 2021, il lui manquera 2 ans (8 trimestres) pour atteindre le taux plein : sa retraite complémentaire sera donc minorée de 1,25% . 8 = 10%.
Le montant de sa retraite complémentaire s’élèvera donc à 68 712 x 0,9527 . 90% = 58 915,73 € brut annuel.
En conclusion, en tant qu’avocat vous avez actuellement 2 régimes de retraite qui se complètent. Les conditions d’obtention de la retraite à taux plein se durcissent et la réforme des retraites prévue ne semble pas convaincre l’ensemble des avocats. Deux solutions s’offrent à vous pour vous garantir une meilleure retraite : le PER et l’assurance-vie. Mais vous pouvez également diversifier votre portefeuille en épargnant à la fois avec un PER ou une assurance-vie et en faisant des placements immobiliers, si vous en avez la possibilité.